Le châtaignier pour contrer la désertification de la Corse

Publié le par Jacques Casoni

Le succès grandissant de ce produit riche en vitamines et en minéraux, notamment sous forme de farine, traditionnellement à l’honneur au début de l’hiver en Corse, est notamment dû aux progrès réalisés dans sa culture et sa transformation. En témoignent les milliers de personnes repartant les bras chargés de sacs de châtaignes, de farine, de biscuits et autres marrons glacés de la très populaire foire annuelle de Bocognano (Corse-du-Sud), a Fiera di a castagna, qui vient de s’achever.

De grandes qualités

Très riche notamment en calcium, fer, magnésium, phosphore et potassium, la farine permet de confectionner la traditionnelle pulenta qui accompagne viandes et fromages frais, ainsi que des crêpes, beignets et biscuits. Ses qualités gustatives et nutritives répondent aussi aux exigences de la diététique moderne, puisque la farine est à la fois énergétique et caractérisée par l’absence totale de gluten, ce qui en fait un moyen de lutte efficace contre la maladie cœliaque.


Loin des premières foires des années 1980, aux tonalités militantes de la renaissance du nationalisme insulaire, cette 27e édition de la foire de Bocognano a durant trois jours été fréquentée par quelque 20.000 visiteurs, ce qui atteste la vigueur d’une filière castanéicole qui participe à l’économie insulaire. Elle s’est déroulée une semaine après les journées gastronomiques autour de la châtaigne organisées au village d’Ortale d’Alesani, au cœur de la Castagnaccia, en Haute-Corse, région la plus peuplée jusqu’à la fin du XIXe siècle et alors surnommée le « poumon de la Corse » en raison de l’importance du châtaigner, dont le bois était aussi très utilisé, dans la vie locale.


Label AOC depuis 2006

« Les gens viennent de toute la Corse. Cette force collective qui représente bien la ruralité est un réel motif d’espoir face aux fatalistes de la désertification », souligne Achille Martinetti, l’organisateur de la foire de Bocognano. Castanéiculteur dans ce village de montagne au nord d’Ajaccio, M. Martinetti est membre du groupement régional des producteurs en appellation d’origine contrôlée (AOC), acteur essentiel de la relance du fruit délicieusement sucré de l’« arbre à pain », nom autrefois donné en Corse au châtaigner.


Ce label AOC obtenu en 2006 a imposé aussi des exigences nouvelles aux producteurs puisque, selon le président de l’Organisme de défense et de gestion de l’AOC farine de châtaigne, Jean-Yves Acquaviva, « il s’agit de la seule AOC dont le cahier des charges impose la culture biologique ».

Après deux mauvaises récoltes dues à la sécheresse en 2007 puis à des pluies diluviennes en 2008, « cette année s’annonce bonne et peut donner un nouvel élan en atteignant la centaine de tonnes de farine », selon le président du Groupement régional des producteurs et transformateurs de châtaignes et marrons de Corse (GRPTCMC), Pasquin Flori.


Pour ce castanéiculteur de Lozzi (Haute-Corse), le rajeunissement de la profession, la mécanisation et l’amélioration de la qualité avec le développement des productions biologiques contribuent au renouveau. Les responsables déplorent toutefois que moins de 10 % des 35.000 hectares de châtaigneraies de l’île soient exploités en raison de l’âge du verger, qui dépasse souvent 300 ans. De nombreuses propriétés ne sont en outre plus entretenues, ce qui laisse progresser certaines maladies comme l’encre.

 

Publié dans La Croix

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